vendredi 26 décembre 2014

Patience de Dieu, proximité de Dieu, tendresse de Dieu. «Seigneur, aide-moi à être comme toi, donne-moi la grâce de la tendresse dans les circonstances les plus dures de la vie, donne-moi la grâce de la proximité face à chaque nécessité, de la douceur dans n’importe quel conflit.»



HOMÉLIE DE PAPE FRANÇOIS
NUIT DE NOËL 2014
«Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière; sur ceux qui habitaient le pays de l’ombre, une lumière a resplendi.» (Is 9,1). «L’ange du Seigneur s’approcha (des bergers) et la gloire du Seigneur les enveloppa de sa lumière.» (Lc 2,9). C’est ainsi que la liturgie de cette Sainte Nuit de Noël nous présente la naissance du sauveur: comme une lumière qui pénètre et dissipe l’obscurité la plus dense. La présence du seigneur au milieu de son peuple efface le poids de la défaite et la tristesse de l’esclavage, et instaure l’allégresse et la joie.
Nous aussi en cette nuit bénie, nous sommes venus à la maison de Dieu en traversant les ténèbres qui recouvrent la terre, mais guidés par la flamme de la foi qui illumine nos pas et animé de l’espérance de trouver la «grande lumière». En ouvrant notre cœur, nous avons-nous aussi la possibilité de contempler le miracle de cet Enfant-Soleil  qui éclaire l’horizon en apparaissant d’en haut.
L’origine des ténèbres qui recouvrent le monde se perd dans la nuit des temps. Repensons à l’obscur moment lors duquel fut commis le premier crime de l’humanité, quand la main de Caïn, aveuglé par l’envie, frappa à mort son frère Abel (cf Gen 4,8). Ainsi le cours des siècles a été parsemé de violences, guerres, haine, injustices.  Mais Dieu, qui avait fondé ses attentes dans l’homme fait à son image et ressemblance, attendait. Dieu attendait. Il a attendu tellement longtemps que peut-être à un certain moment il aurait dû renoncer. Mais Il  ne pouvait pas renoncer, Il ne pouvait pas se renier Lui-même (cf 2 Tm 2,13). C’est pourquoi Il a continué d’attendre avec patience face à la corruption des hommes et des peuples. La patience de Dieu. Combien il est difficile de comprendre cela : la patience de Dieu envers nous!
Tout au long du chemin de l’histoire, la lumière qui déchire l’obscurité nous révèle que Dieu est Père et que sa patiente fidélité est plus forte que les ténèbres et que les corruptions. En cela consiste l’annonce de la Nuit de Noël. Dieu ne connait pas l’explosion de colère et l’impatience; Il est toujours là, comme le père de la parabole du fils prodigue, dans l’attente d’entrevoir au loin le retour du fils perdu; et tous les jours, avec patience. La patience de Dieu.
La prophétie de Isaïe annonce l’apparition d’une immense lumière qui déchire l’obscurité. Elle nait à Bethléem et est accueillie par les mains aimantes de Marie, par l’affection de Joseph, par l’étonnement des bergers. Quand les anges annoncèrent aux bergers la naissance du Rédempteur, ils le firent avec ces mots: «Et voilà le signe qui vous est donné: vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire» (Lc 2,12). Le «signe» est justement l’humilité de Dieu portée à l’extrême; c’est l’amour avec lequel, cette nuit-là, Il a assumé notre fragilité, notre souffrance, nos angoisses, nos désirs et nos limites. Le message que tous attendaient, celui que tous cherchaient au plus profond de leur âme, n’était rien d’autre que la tendresse de Dieu: Dieu qui nous regarde avec des yeux remplis d’affection, qui accepte notre misère, Dieu amoureux de notre petitesse.
En  cette Sainte Nuit, pendant que nous contemplons l’Enfant Jésus qui vient de naitre et déposé dans une mangeoire, nous sommes invités à réfléchir. Comment accueillons-nous la tendresse de Dieu? Je me laisse rejoindre par Lui, je le laisse me prendre dans ses bras, ou bien je l’empêche de s’approcher? «Mais moi je cherche le Seigneur» - pourrions-nous répliquer. Toutefois, la chose la plus importante n’est pas de le chercher, mais bien de s’abandonner à ce que se soit Lui à me chercher, à me trouver et à me caresser amoureusement.  C’est la question que l’Enfant nous pose par sa seule présence: je permets à Dieu de m’aimer?
Et encore: avons-nous le courage d’accueillir avec tendresse les situations difficiles et les problèmes de ceux qui nous sont proches, ou bien préférons-nous les solutions impersonnelles, peut-être efficaces mais dépourvues de la chaleur de l’Évangile? Oh combien le monde d’aujourd’hui a besoin de tendresse! Patience de Dieu, proximité de Dieu, tendresse de Dieu.
La réponse du chrétien ne peut être différente de celle que Dieu donne à notre petitesse. La vie doit être affrontée avec bonté, avec douceur. Quand nous nous rendons compte  que Dieu est amoureux de notre petitesse, que Lui même se fait petit pour mieux nous rencontrer, nous ne pouvons pas ne pas Lui ouvrir notre cœur, et le supplier: «Seigneur, aide-moi à être comme toi, donne-moi la grâce de la tendresse dans les circonstances les plus dures de la vie,  donne-moi la grâce de la proximité face à chaque nécessité, de la douceur dans n’importe quel conflit.»
Chers frères et sœurs, en cette Sainte Nuit nous contemplons la crèche: là «Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière (Is 9,1). La virent les gens simples, les gens disposés à accueillir le don de Dieu. Au contraire, ne la virent pas les arrogants, les orgueilleux, ceux qui établissent les lois selon leur propres critères personnels, ceux qui adoptent une attitude fermée. Regardons la crèche et prions, en demandant à la Vierge Mère: «Oh Marie, montrez-nous Jésus!».

(traduction: Véronique Marie-Paule)

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